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Ironman France

J'écris ce récit de course bien installé sur mon petit nuage. Aujourd'hui encore, il m'est difficile de réaliser l'exploit accompli ce Dimanche 29 juin 2014 à l'Ironman de Nice.

Moi l'amateur, moi le vétéran, moi le papa cool, terminer 10e de l'ironman de Nice, relèvait de la science fiction. Au matin de la course si on m'avait dis que je ferais un TOP 10, je n'aurais surement pas pris le départ de peur d'échouer.

Casse du siècle sur la promenade des Anglais façon Spaggiari !

H-12 COACH BRIEFING

Christophe Bastie, entraîneur Multriman, me livre les dernières consignes de course. Christophe, avec l'accent Stéphanois s'il vous plait : "En Nat, tu dois être agressif dès le début"..."tu pars pour un 400"..."A vélo, tu ne relaches pas ton effort"..."tu mets de l'intensité jusqu'au Col"...
Je comprends clairement ce qu'il attend de moi : me battre comme un soldat...attitude de guerrier façon spartiate...voir en moi l'oeil du tigre...Je fredonne la musique de "Eye Of The Tiger" de Frank Stallone !". Je m'égare, je suis hors sujet.

H-10 DINER

Au restaurant, pour l'apéritif, je bois ma bière habituelle. La veille d'une course, Ne pas bousculer les habitudes. Ne pas oublier de bien s'hydrater.
- Le serveur me demande : "mais vous faites le marathon demain ?
- Moi : "L'ironman Monsieur"
- Le serveur : "Et vous buvez de la bière ?
- Moi : "Why not ?!"
Je vois bien le serveur amusé de la situation. Autour de moi, tous les triathlètes sont à l'eau, ou au mieux au coca. Ne jamais se fier aux apparences !

H-2 WAKE UP

Un 1/2 Gateau sport plus tard, je file à l'anglaise. Une belle journée de sport m'attend sur la Prom'.

H-45' WARM UP

Fort de mon expérience sur le 70.3 d'Aix, je décide d'aller gouter l'eau. On retire toujours quelque chose de ses échecs. Je glisse dans l'eau. Je suis quasiment seul. La mer est calme. Le soleil se lève doucement. Quelle sensation incroyable. J'adore ces moments de calme avant la tempête.
Au coups de feu, 2 500 triathlètes s'élançeront pour en découdre.

START

Je sprint. Pas de bousculade. Le sas -55' est dans l'alignement des bouées. Si tu nages droit, tu vas tout droit !
Le gros effort fournit au départ me permet d'accrocher la tête. Je me focalise sur l'alignement des bouées.
Je coupe les battements. Je nage désormais en traction avant. Le cardio redescend doucement. Je reprend mon souffle. C'est tout relatif car je respire toujours en deux temps.
1900m plus tard, fin de la première boucle. Sortie de l'eau à l'Australienne, j'entend le speaker, la zic à bloc, les hurlements de la foule...quelle ambiance de fou...C'est pas le moment de se déconcentrer. Il faut plonger, remttre en route, reprendre le rythme, et retrouver sa place dans le groupe.
Le deuxième tour passe tout aussi vite. Je parviens même à augmenter ma fréquence de bras et revenir un peu devant. A la sortie de l'eau, je roule comme un gallet. Un bénévole m'extrait de la grande bleue !

[ NATATION ] [ 53'10" ] [ 19e ] [4e 40-44]

BIKE

Les choses sérieuses commencent avec l'épreuve cycliste.
180km dans l'arrière pays Niçois, et un dénivelé d'environ 2400m, devrait me dégourdir les gambettes.
Je m'élance sur ma monture, version light, avec l'idée de bien faire.
Je me repasse en boucle les consignes du coach, vous savez le stéphanois qui appuie sur le eueueu...
A St Laurent du Var, le coach est au bord de la route, il me lance : 3e !
C'est l'étincelle qui manquait au moteur à explosion.

Rapidement, un regroupement s'opère avec plusieurs groupes d'âge.
Deux PROS sont de la partie : dossard N°20 CHRISTIAN BRADER (Allemand) et N°45 TILL SCHRAMM (Anglais).
Tous deux partis 5 minutes avant moi, ont visiblement sécher quelques séances natation.
Dans la terrible côte de Gatière, le groupe se fait déjà la guerre. Je monte à mon rythme. Au sommet, je prends 100m dans les dents. J'embraye sur le grand plateau pour revenir au train car derrière se profile la descente.

Copyrights Photos ©Pierre Moulierac

Dans les gorges du Loup, la pluie fait son apparition. La route fraichement mouillée, rend la chaussée aussi glissante qu'une piste de bowling, et les quilles c'est nous !
Je redoutais ce moment car mon vélo est équipé de pneus slicks. Vous savez ces pneus à la gomme lisse et tendre. Un régal sur route sèche mais un désastre sur route mouillée.
Les premières courbes donnent le ton. C'est holliday on Ice avec les jurrons de Candeloro en plus.
Il faut dire que la descente sur Tourettes sur Loup est très rapide. Je pilote ma savonette tant bien que mal.
Ne pas couper la route, ne pas coucher le vélo, réduire sa vitesse, tenir la corde, éviter que la roue arrière ne vous rattrape, et sortir de la courbe si possible en vie !
A chaque virage, mon coeur bat la chamade. Je n'aime pas cette sensation, entre supplice du pal et roulette russe.

Enfin une côte, c'est la délivrance ! Dans la partie de pocker, le groupe c'est réduit à quatre unités : MOI, BRADER, SCHRAMM, HAMON.
Nous entamons la montée de Gourdon. Je ne l'aime pas celle-là ! Surtout quand un sauvage de la pédale, fait littérallement exploser le groupe. Maxime Hamon, joue les cavaliers seuls. Les deux PROS font l'effort. Moi, j'écoute mon coeur et ma raison, je monte à ma main. Nous sommes au pied du col, long d'une quinzaine de kilomètre, tout peut encore se produire. Ma stratégie monter cressendo pour espérer revenir sur le final.
La deuxième partie du col est plus régulière. C'est celle-là que je préfère. Le route s'ouvre sur un panorama à couper le souffle. Je visualise les écarts. Rapidement, je reprend Hamon qui faiblit. Quelques virages plus loin, j'ai raccroché le wagon.

Nous basculons au col de l'Ecre avec le retour de la pluie. Le train est soutenu. Je me force à manger ces satanées Powerbar.
La descente de Gréolière est elle aussi très glissante. Il faut freiner et relancer à chaque virage.
La deuxième difficulté du jour se profile. La montée sur Coursegoules permet de me réchauffer.
J'attend avec impatience le demi tour au col de Vence, dans l'espoir de croiser la tête de la course.
Dans l'intervalle, nous doublons Faure qui vient de bacher (no comment).
Billard, Butterfield, Delcoral et Jurkiewicz passent tellement vite que j'ai à peine le temps d'encourager Jeremy multriman spirit!.
A son tour, il me rend le salut en levant le pouce, tel César sauvant la vie de son gladiateur.
Au demi tour, j'aurais compté 10 gars. C'est tout bon pour moi.
Il ne me reste plus qu'à glisser jusqu'à la mer en évitant les dérapages incontrôlés.

Dans la grande descente de Bouyon, on reprend encore 3 PROS, Delsaut, Dorrez et un Anglais(?). Ils descendent sur les freins. Finalement les pneus slicks c'est comme en F1, il faut bien les chauffer avant !
Le britanique n'est pas très à l'aise et visiblement ne connait pas la descente, je le dépasse au plus vite.
Quelques centaines de mètre plus tard, au sortir du village il ferra une chute terrible.
Nous crions sur les secouristes situés en contre bas pour qu'ils intervennient au plus vite.
Cette partie du parcours est tristement célèbre pour ses chutes.

Je suis à 35km de l'arrivée. J'ai encore deux Powerbar collées sur le cadre...punaise. Mon challenge : les engloutir avant l'arrivée ! J'en profite pour faire une parenthèse. L'alimentation est vitale sur ironman.
Sur les 180km, j'aurai consommé : 6 powerbars, 4 gels, 1 banane et 8 bidons
En calories cela donne : 6X200 + 4X110 + 1x100 + 8x120 soit 2 700 Kcal.
L'effort fournit sur le vélo sur 180km à fc avg 142 est d'environ 3 000 Kcal : CQFD !

Copyrights Photos ©Pierre Moulierac

Je rallie la promenade des Anglais rebaptisée promenade des Belges, sain et sauf.
Je pose mon bike et remonte l'interminable parc à vélo.
Au loin, j'aperçois un bénevol qui me tend mon sac. Ce n'est autre que Babette BARRAUD, de Ligue Côte d'Azur.
Le speaker m'annonce premier groupe d'âge. Les gens autour de moi sont histériques, ils me crient littéralement dessus. Je ne dois pas me laisser déconcentrer. Faire le job jusqu'au bout, c'est ça ma mission.

[ VÉLO ] [ 4:58:26 ] [ 7e ] [ 1e 40-44 ]

MARATHON MAN

Du groupe de trois, c'est l'allemand CHRISTIAN BRADER le plus rapide à la transition. Il est déjà sur orbite pour sa 5e place. Je sors du parc avec l'anglais TILL SCHRAMM sur mes talons. Ce dernier abandonnera au semi.
Le marathon sur la promenade des Anglais n'est pas vriment ma tasse de thé (désolé!).
Je n'ai jamais réussi à courir ici en moins de 3h15'. Je dois en faire abstraction et continuer sur la même dynamique. J'ai le couteau entre les dents. Je ne me reconnais pas moi même. C'est sur ces 42 kilomètres que tout va ce jouer. Soit je sors la course de ma vie, soit je refais un énième Top 20. Aujourd'hui je veux y croire.
Les caprices de la météo rend le temps imprévisible, pluie, soleil et chaleur, alternent successivement. Ce n'est pas sans me déplaire. Le corps monte moins en température et par conséquent le rythme cardiaque aussi. Courir un 3h15', mon niveau au cours de ces deux dernières années, serait l'idéal. Sur le papier c'est toujours si simple mais la réalité vous rattrape souvent.

Que neni...Que trépasse si je faiblis !

Je cours déjà sur les bases de 3h10'. Je sais pertinemment que mon deuxième semi marathon sera moins rapide. Mon conseil du jour : "oublie que tu n'as aucune chance, vas-y, fonce, on ne sait jamais, sur un malentendu ça peut marcher !"
J'avance dans mon marathon sans trop gérer l'allure. Je me concentre sur le relachement.
Ma montre lap tous les kilomètres. La vitesse réelle sur un kilomètre, est assez trompeuse. Elle peut te motiver dans l'instant. Mais au final, c'est la vitesse moyenne qui est importante. Mon tableau de marche sera le suivant : 1e 10K 42'10", 2e 10K 43'10", 3e 10K 45'30", 4e 10K 48'45". Avec le 1e semi en 1h30 et le 2e en 1h36.
Une lente descente en enfer. Mais je ne suis pas le seul à subir. Chaque tour bouclé est une petite victoire sur soi même.
Heureusement, qu'aujourd'hui j'avais du monde au bord de la route. Vos encouragements m'ont littéralement boosté ! Je dois vous remercier toutes et tous pour votre soutien et vos encouragements. Vous qui étiez sur le bord de la route ou sur internet à me suivre : MERCI ! Je reconnais que je n'étais pas très avenant. L'effort, la douleur, la concentration, ont eu raison de mon sourire. Une mention toute particulière à la famille Bastie au complet, Audrey, Eddy, Eric, Morgan, Thomas, Gérard, Babette, Karl, Camille...(et j'en oublie surement !)

Si je dois résumer ma course. J'ai appliqué les consignes à la lettre, en maintenant le rythme jusqu'au bout. Je réalise une course pleine dans les trois disciplines. Question chiffres, j'explose littéralement mon meilleur chrono sur marathon en 3h06' et frôle le SUB9 en 9h04'. Les conditions de course, la météo, et la forme du jour m'ont permis de sortir la course parfaite. Tout cela n'est pas le fruit du hasard, mais bel et bien le fruit d'un travail long et méthodique.

Depuis six années, Christophe Bastie me fait progresser. Il a ce truc en plus qui vous fait vous dépasser ! Multriman ce n'est pas seulement un centre d'entraînement, c'est un état d'esprit, une éthique sportive.
Je profite de l'occasion qui m'est donnée pour lui témoigner toute ma gratitude.
Les élites du groupe Multriman, Jeremy Jurkiewicz et Denis Chevrot, sont aussi une grande source d'inspiration et de motivation.

Sophie, mon épouse, est mon soutient au quotidien. N'est-ce pas là la plus belle preuve d'amour ?
Elle est mon moteur. Sans elle rien de tout cela ne serait possbile. Je lui dois tout.
Je dois également vous avouer que cet hiver, j'avais pris la décision d'arréter le triathlon après Nice.
Mais une fois encore, c'est grace à elle, que j'ai décidé de poursuivre l'aventure.

J'aimerais conclure ce récit de course en remerciant mon partenaire le Team Lewatt.
Je suis vraiment très fier de faire partie du team et de pouvoir honorer la confiance qu'il me porte.
Team Lewatt est amené à se faire connaitre rapidement au vu des qualités de ses membres.
Aujourd'hui nous étions deux engagés du Team Lewatt. Nous gagnons chacun notre groupe d'âge.

Sans oublier bien sûr mon club, Saint-Raphaël Triathlon ma deuxième famille !

TEAM LEWATT

Linda Guinoiseau 5e, 1e (40-44), 9h42'
Edouard Entraygues 10e, 1e (40-40), 9h04'

RÉSULTATS COMPLETS
Edouard Entraygues
Swim: 53:10 | Bike: 4:58:26 | Run: 3:06:54 | Overall: 9:04:48 - 10e
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